dimanche 13 décembre 2009

La réponse de Yossef Lapid

Ci-dessous, la réponse de Yossef Lapid à un article d'Anton Shamas, auteur palestino israélien, parue dans le numéro de Yom Haatzmaout de l'hebdomadaire tel-avivien. Une réponse particulièrement brillante et réaliste, qui remet les choses à leur place !

L'auteur palestino-israélien, connu pour l'égalité de sa plume, écrivait :
Mesdames et Messieurs, le moment est venu, en ce jour de fête, de reconnaître avec une totale franchise, sans sentiment de honte, ni en baissant les yeux, que toute cette affaire s'est mal terminée. L'aventure sioniste s'est soldée par un échec total.

Réponse de Yossef Lapid :
Shamas, mon ami, Le sionisme est la plus grande 'success story' du XXe siècle.
• Cinquante ans après la défaite de Hitler et du Mufti de Jérusalem, le sionisme vit et prospère au coeur du Moyen-Orient, dans un Etat de 4 millions et demi de Juifs, dont la survie pouvait faire doute, à un moment donné.
• La langue hébraïque (une des merveilles du sionisme) a fait l'union des Sabras [Israéliens nés dans le pays] et des réfugiés des camps, des Séfarades et des Juifs d'Orient et d'Occident.
• En un demi-siècle et en partant pratiquement de zéro, les sionistes ont forgé un Etat qui lance ses propres satellites dans l'espace et approvisionne la marine américaine en avions-espions sans pilote.
• Un Etat qui exporte des progiciels compliqués et enseigne aux Latino-Américains comment faire pousser des melons.
• Un Etat qui exporte tous les mois des produits, pour une valeur de plus d'un milliard de dollars, vers l'Europe occidentale, les Etats-Unis et même le Japon.
• Une démocratie exemplaire, où les ministres craignent les contrôles de comptes et où les juges ne craignent que D-eu.
• Un Etat qui a produit une armée considérée comme l'une des meilleures du monde.
• Un Etat où il y a peu de crimes de sang, mais beaucoup de bons concerts.
• Où les fidèles de toutes les religions jouissent de la liberté de culte, et où les non-croyants sont également les bienvenus.
• 10% des citoyens du pays sont de nouveaux immigrants.
• 89% estiment que, malgré toutes les difficultés (et l'Agence Juive), c'est un pays où il fait bon vivre.

Voilà un Etat où un Anton Shamas est libre, un jour de fête nationale [israélienne], de publier une virulente attaque contre tout ce qui est cher aux Juifs vivant dans ce pays. Shamas sera peut-être capable de nous pardonner tout cela.

Mais ce qu'il ne peut pas supporter, c'est le fait que, présentés à la lumière des réalisations du sionisme, les échecs arabes apparaissent si humiliants et déprimants.

• Combien y a t il de Palestiniens, mon ami ? un million ? deux ? trois ?
• Et combien d'Etats arabes t'entourent ? - Vingt ? Vingt pays de rois et de dictateurs, de terreur et d'effusion de sang.
• Il n'existe pas une seule démocratie arabe avec liberté d'expression et droits civiques.
• Tu nous parles de l'échec de l'Etat d'Israël. Comparé à qui, à quoi ? - A l'Algérie ? A l'Egypte ? A l'Irak ?
• Combien y a-t-il d'Arabes entre l'Océan Atlantique et le Golfe Persique ? - Cent millions ? Deux cents millions ?
• Et combien y a-t-il de musulmans ? - Un milliard ! et ils prient tous le même Allah, au nom du même prophète, Mahomet. Et tous, tant qu'ils sont, ils ne peuvent pas résoudre le problème des égouts à Gaza !

Depuis 47 ans, vous vous êtes préparés à l'indépendance palestinienne,
et pourtant vous ne vous êtes toujours pas mis à ramasser les ordures ménagères à Jéricho.
Malgré tout le pétrole du monde, vous n'êtes pas parvenus à mobiliser la fraternité arabe nécessaire pour construire l'hôpital, à Deir El Balah. Et tous les robinets en or massif d'Arabie Saoudite et tous les jacuzzis du Koweït ne suffisent pas à fournir de l'eau potable à Jabalyia.
Ceci dit, mon ami - tu le sais bien, n'est-ce pas ? - si un million de Juifs vivaient à Gaza, cette ville deviendrait un paradis sur terre. A ce moment-là, les ouvriers palestiniens feraient la queue au passage d'Erez pour y travailler.


S'il y avait dans le monde un milliard de croyants juifs, les Juifs de Gaza n'auraient pas besoin d'aumônes onusiennes. Les Juifs du monde prendraient soin des Juifs de Gaza, et Gaza serait depuis longtemps la perle de la Méditerranée. Allons, tu sais tout cela, Anton Shamas, et c'est bien ce qui t'exaspère.

C'est l'envie qui te dévore et qui t'égare. Ainsi, vois-tu, le moment est venu de conclure avec une totale franchise, sans sentiment de honte, ni en baissant les yeux:
cela n'a pas marché, toute cette affaire. L'aventure palestinienne s'est soldée par un échec total.

lundi 7 décembre 2009

Interview de Tzipi Livni dans Le Parisien.fr

Présidente du parti centriste Kadima fondé par Ariel Sharon, Tzipi Livni, 51 ans, chef de file de l’opposition israélienne, a rencontré Nicolas Sarkozy à l’Elysée la semaine dernière.

L’Iran semble de plus en plus près d’avoir l’arme nucléaire. Que faire ?

Sur ce dossier, les prises de position du président Sarkozy sont cruciales. Le président français a parfaitement compris la nature de la menace iranienne. S’il est vrai qu’Ahmadinejad répète qu’il veut rayer Israël de la carte, le danger va bien au-delà. La plupart des pays arabes de la région sont en danger, le monde entier est en danger. Il ne s’agit pas de savoir ce qu’il faudra faire le jour où l’Iran aura l’arme nucléaire, car ce serait le point de non-retour absolu. Il faut l’empêcher de l’avoir. Et il faut agir tout de suite. Téhéran a essayé de cacher ses installations proches de Qom et ne veut pas coopérer avec l’AIEA. L’Iran aura la bombe si le reste du monde ne se mobilise pas pour l’arrêter. Il doit comprendre qu’on ne le laissera pas faire. La communauté internationale doit cesser de recourir à des compromis. Elle doit prendre des sanctions beaucoup plus efficaces. Et je vois que c’est ce que préconise la France.

Comment réagissez-vous à l’initiative de l’Union européenne qui veut déclarer Jérusalem-Est comme capitale d’un futur Etat palestinien ?

Cette initiative ne va pas aider à relancer les négociations de paix entre Israël et les Palestiniens. C’est une erreur. S’il est de l’intérêt des deux parties en cause à reprendre le dialogue, c’est à elles deux de prendre les décisions, pas à l’Union européenne. Cela n’aide personne. Et c’est tout simplement hors de question. Le statut de Jérusalem fait partie des négociations de paix.

Est-il possible de renouer le dialogue entre Israéliens et Palestiniens ?

Nous pouvons parfaitement reprendre les négociations au point où elles se sont arrêtées il y a un an. Elles n’ont pas échoué, pas capoté. Elles ont été interrompues, essentiellement à la suite des élections israéliennes. Nous devons nous remettre autour d’une table.

Quels pays, ou quelles puissances, peuvent aider à la reprise des contacts ?

L’attitude de Washington est capitale. La communauté internationale est entraînée par les Etats-Unis. Mais l’Union européenne peut aussi avoir de l’influence. Et Nicolas Sarkozy a une position de leadership. Mais le poids des Etats-Unis est crucial. Les Israéliens pensent que les Américains les connaissent mieux et sont mieux à même de les entendre et les comprendre.

Mais Barack Obama semble moins favorable à Israël que son prédécesseur…

Entre les Etats-Unis et Israël, ce n’est pas une question de personne. Sur le fond, peut importe qui est à la Maison-Blanche. Les Etats-Unis prennent à coeur l’intérêt d’Israël. Aujourd’hui, cet intérêt passe par l’existence de deux Etats, l’un israélien, l’autre palestinien. Une large majorité de la population israélienne est d’accord sur le principe de « deux Etats pour deux peuples ».

Avec quel interlocuteur du côté palestinien ?

Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne. Il est là. Il est notre partenaire légitime dans les négociations de paix. Nous avons besoin de lui, et de ce qu’il représente, pour mettre fin à un conflit entre deux peuples. La bonne stratégie est de travailler avec Mahmoud Abbas et les siens même si, en ce moment, ils sont en position de faiblesse. Nos positions divergent, mais on devrait tout de même trouver un dénominateur commun pour mettre fin au conflit.

Mais Benyamin Netanyahou, le Premier ministre israélien, veut-il, lui, d’un Etat palestinien ?

C’est faute d’accord entre nous sur ce point et d’autres que j’ai refusé de participer au gouvernement et que je suis le chef de l’opposition. Quand je suis à l’étranger, je dois équilibrer entre mes critiques envers le gouvernement et la volonté de ne pas attaquer le Premier ministre, alors je m’arrêterai là.


Retrouver l'article sur le site du parisien.fr :